Dernières balises avant mutation


113e cigarette sans dormir

les enfants de Napoléon
dans leurs mains tiennent leurs roustons
s'ils ont compris tous les clichés
ça f'ra d' la bidoche pour l'armée...
les partouzeurs de miss métro
patrouillent au fond des souterrains
mais ils rêvent d'être en hélico
à s' faire de nèg' et du youpin... 
les vopos gravent leurs initiales
dans le brouillard des no man's lands
et les démasqueurs de scandales
prennent le goulag pour Disneyland...
les gringos sortent un vieux crooner
pour le western du silence
demain, au Burgenbräukeller
je lègue'rai mon âme à la science... 
car moi je n'irai pas plus loin
je tiens ma tête entre mes mains
guignol connaît pas de sots métiers
je ris à m'en faire crever ! 
le petites filles de Mahomet
mouillent aux anticoagulants
depuis qu'un méchant gros minet
joue au flipp avec le Coran
les dieux changent le beurre en vaseline
et les prophètes jouent Dracula
s'il vous reste un fond d' margarine
j'en aurai besoin pour ma coda 
car moi je n'irai pas plus loin
je tiens ma tête entre mes mains
guignol connaît pas de sots métiers
je ris à m'en faire crever ! 
 
tu traîne ta queue dans la chaux vive
et t'hésites à choisir ton camp
t'as des aminches à Tel-Aviv
et des amours à Téhéran...
si tu veux jouer les maquisards
va jouer plus loin, j'ai ma blenno
tu trouveras toujours d'autres fêtards
c'est si facile d'être un héros... 
mais moi je n'irai pas plus loin
je tiens ma tête ente mes mains
guignol connaît pas de sots métiers
je ris à m'en faire crever 
retour aux joints et à la bière
désertion du rayon képis !
j'ai rien contre vos partenaires
mais rien contre vos p'tites soeurs ennemies
manipulez-vous dans la haine
et dépecez-vous dans la joie
le crapaud qui gueulait : je t'aime
a fini planté sur une croix ! 
et moi je n'irai pas plus loin
je tiens ma tête entre mes mains
guignol connaît pas d' sots métiers...
non moi je n'irai pas plus loin
je tiens ma tête entre mes mains
guignol connaît pas d' sots métiers
je ris à m'en faire crever
arsenic is good for you
à m'en faire crever
arsenic is good for you		(ad lib.) 
Paroles et musique : Hubert-Félix Thiéfaine
© Editions Masq.

Narcisse 81

il pleut des nénuphars en face
des miroirs où glissait ton corps
mais tout s'efface en laissant la place
à ce larsen qui te distord
tu glisses ta carte perforée
dans ce flipper où tu t'enfuis
et tu fais semblant de rocker
pour faire croire que tu es en vie !
Narcisse ! balise ta piste
y a des traces de pneu sur ton flipp
et ta petite soeur qui s' tape ton fixe 
tu t'en retournes à tes banlieues
dans ce couloir où tu te grimes
te maquillant le bout des yeux
d'un nouveau regards anonyme
le futur te sniffe à rebours
te plantant sur un look rétro
te reste-t-il assez d'amour
pour prendre ton dernier mélo ?
Narcisse ! balise ta piste
y a des traces de pneu sur ton flipp
et ta p'tite soeur qui s' tape ton fixe 
les chiens t'attendent au bout du quai
avec des plumes et du goudron
ils vendent des orgasmes en sachets
mais ils font la gerbe en location
tu pensais franchir le miroir
sans avoir à changer de gueule
tu craches le sang dans ta baignoire
et tu t'essuies dans un linceul...
la nuit te glace au fond d'un train
où tu pensais trouver l'oubli
voyageur du petit matin
tu rentres de tes insomnies
tu rayes les mentions inutiles
au bas de ton carnet d'absence
et tu r'accroches au bout du fil
qui te ramène à ton silence
Narcisse ! balise ta piste
y a des traces de pneu sur ton flipp
et ta p'tite soeur qui s' tape ton fixe
Narcisse ! balise ta piste
y a des traces de pneu sur ton flipp
et ta p'tite soeur qui s' tape ton fixe
y a des traces de pneu sur ton flipp
et ta p'tite soeur qui s' tape ton fixe 
Paroles : Hubert-Félix Thiéfaine
Musique : Claude Mairet
© Editions Masq.

Mathématiques soutérraines

pauvre petite fille sans nourrice
arrachée du soleil
il pleut toujours sur ta valise
et t'as mal aux oneilles
tu zones toujours entre deux durs
entre deux SOS
tu veux jouer ton aventure
mais t'en crèves au réveil... 
tu fais semblant de rien
tu craques ta mélanco
de 4 à 5 heures du matin
au fond des caboulots
et tu remontes à contrecoeur
l'escalier de service
tu voudrais qu'y ait des ascenseurs
au fond des précipices 
oh ! mais laisse allumé, bébé
y a personne au contrôle
et les dieux du radar sont tous out
et toussent et se touchent et se poussent
et se foutent et se broutent
oh ! mais laisse allumé, bébé
y a personne au contrôle
et les dieux du radar sont tous out
et toussent et se touchent et se poussent
et se foutent et se mouchent
dans la soute à cartouches... 
maintenant du m'offres tes carences
tu cherches un préambule
quelque chose qui nous foute en transe
qui fasse mousser nos bulles
mais si t'as peur de nos silences
reprends ta latitude
il est minuit sur ma fréquence
et j'ai mal aux globules 
oh ! mais laisse allumé, bébé
y a personne au contrôle
et les dieux du radar sont tous out
et toussent et se touchent et se poussent
et se foutent et se broutent
oh ! mais laisse allumé, bébé
y a personne au contrôle
et les dieux du radar sont tous out
et toussent et se touchent et se poussent
et se foutent et se mouchent
dans la soute à cartouches...   (ad lib.) 
Paroles et musique : Hubert-Félix Thiéfaine
© Editions Masq.

Taxiphonant d'un pack de Kro

allô SOS Amitié
allô SOS Amitié
excusez-moi de vous déranger
mais si j' peux encore vous causer
c'est qu' mon pétard est enrayé
allô SOS Amitié
allô SOS Amitié
je crois bien qu' ça vient du chargeur
est-ce que vous pouvez m'envoyer
assez rapidement le dépanneur ?
allô SOS Amitié
la vie c'est pas du bubble-gum
et rien qu' le fait de respirer
ça m' fout des crampes dans le sternum !
allô SOS Amitié
allô SOS Amitié
allô, allô
les mannequins des cortèges officiels ont goudronné
ma tendresse et la famille Duraton veut m'obliger
à finir mon tapioca alors que ça fait bientôt
2000 ans que je n'ai plus faim
allô SOS Amitié
allô
j' suis dans un train fantôme bloqué
sur une voie de garage
est-ce que ma carte vermeille
me donne droit au sleeping (.../...) ?
allô ici SOS Amitié
vous êtes sur répondeur automatique
et vous avez 30 secondes pour vous pendre ! 
Paroles et musique : Hubert-Félix Thiéfaine
© Editions Masq.

Scènes de panique tranquille

valium / tranxène / nembutal / yogourts / acides ? 
fais-moi une place dans ton linceul
quand y en a pour un y en a pour deux
fais-moi une place dans ton linceul
pour un coup de dents, j' t'arrache les yeux 

Cabaret Sainte-Lilith

y a toujours un cinglé au bout de son trimard
qui se crame les yeux sur un ours en chaleur
du côté de ces nuits où s'enfuit le hasard
avec les doigts collés de foutre et de sueur
y a toujours en taxi qui se perd dans la brume
avec une reine morte en pâture aux fantômes
et de vieux corbeaux rances en marge du bitume
qui s'en viennent crever au détour de ta zone
Lilith ! oh Lilith 
y a toujours un pingouin qui souffle ses poumons
à travers un saxo branché sur du mélo
et des gosses exilés qui maquillent leurs noms
sur les fiches-transit d'hôtels hallucinos
y a toujours un pigeon qui s'envole en fumée
dans les couloirs visqueux d'un vieux rêve-agonie
et des cigares bandants sur les lèvres flippées
de dieux défigurés maquillés par tes nuits
oh ! Lilith
tu sais comment ça jouit
lilith
les mecs roussis :
les dingues de la déglingue
qui s' flinguent derrière ton zinc
Lilith ! Lilith !
tu sais comment / comment ça jouit
les mecs complètements stress
qui t' réclament aux toilettes :
une p'tite canette / une p'tite fumette
une reniflette / une seringuette
une bonne branlette
et puis : ciao... dodo 


Y'a toujours une petite frangine qui se noie dans ses nerfs
au fond d'une arrière-salle d'un vieux boxon crado
et d'autres qui s'en vont respirer le grand air
sur une plage à Hambourg / à Belfast ou Galsgow
y a toujours un clébard de bar unijambiste
qui largue ses sachetons dans le W.-C. pour dames
et des gonzes un peu raides au bras de vieilles groupies
qui dégueulent en riant leur Canigou on ice
oh ! Lilith
tu sais comment ça jouit
Lilith
les mecs roussis 
tu marches nulle part à genoux sur mes rames
avec des souvenirs à tringle du bourrin
tu descends le quartier où les mômes jouent aux dames
et me font voir la came dans le creux de leurs mains
mais j'ai perdu l'adresse des autres solitudes
à contempler la noille dans les yeux des passants
souvent t'en as croisé au bord de l'hébétude
qui ne pouvaient dormir sans leur dose de sang
Lilith !
tu sais comment ça jouit
Lilith
les mecs finis :
les dingues de la déglingue
qui s' flinguent derrière ton zinc
Lilith ! Lilith !
tu sais comment / comment ça jouit
les mecs complètement stress
qui t' réclament aux toilettes :
une p'tite canette / une p'tite fumette
une reniflette / une seringuette
une bonne branlette
et pis... ça joue ! ça jouit ! 
Paroles : Hubert-Félix Thiéfaine
Musique : Claude Mairet
© Editions Masq.

Photographie-tendresse

cheveux-tilleuls-écartelés-sur-visage-
taxiphone-de-l'attente-souvenir-coma-
trauma-de-vieillard-géranium-camé-
baisers-tranxène-coagulés-sur-miroir-
hygiaphone-T.V.-lunettes-noires-pyjama-rayé-
wo ist das Blut ?
ich habe Durst... 

Une fille au rhésus negatif

je me souviens de toi dans ces années obscures
où tu te promenais avec un << rat en laisse >>
les cafards te disaient : l'amour vient du futur
et te laissaient leurs croix comme on laisse une adresse
maintenant tu me regardes avec les yeux flétris
bouffés par la machine à plastiquer les rêves
tu me tends mon ticket pour la foire aux zombies
et m'invites à trinquer au doomsday qui se lève
oh ! love
lové sur ton ventre le bébé s'ouvre les veines
et tu me demandes s'il a bien pris sa dose 
nous sommes de vieux enfants traînant nos écorchures
à travers les décors jaunis d'un vieux cartoon
nous marchons sur Berlin en gobant nos oeufs durs
et nous sommes à Paris victimes d'un baby-boom
nous n' sommes que les fantasmes fous d'un computer
avec son oeil grinçant fouillant dans nos cerveaux
dans la fluorescence bleutée de son scanner
je regarde l'aiguille s'enfoncer dans ta peau
oh ! love
lové sur ton ventre le bébé s'ouvre les veines
et tu me demandes s'il a bien pris sa dose 
les mômes de ton quartier se déguisent en momies
un aigle lentement tourne autour de ta chambre
les assassins défilent en levant leurs képis
les bébés tombent du lit en lisant Mein Kampf
oh ! love... love
hier je t'aimerai de mon amour taxi
hier je t'aimerai de mon amour tocsin
hier je t'aimerai dans un bar à minuit
des soirs... où la tendresse fait plus bander les chiens
oh ! love... love
les ambulances attendent le long des terrains vagues
les réverbères s'allument au fond des catacombes
les bulldozers préparent l'autoroute pour le stade
dois-je me faire installer le téléphone sur ta tombe ?
oh ! love
lové sur ton ventre le bébé s'ouvre les veines
et tu me demandes s'il a bien pris sa dose ? 
Paroles : Hubert-Félix Thiéfaine
Musique : Claude Mairet
© Editions Masq.

Exil sur planète fantome

en ce temps-là nos fleurs vendaient leur viande aux chiens
et nous habitions tous de sordides tripots
avec des aiguillages pour nos petits matins
quand le beau macadam nous traitait de salauds
nous traitait de salaud
nous vivions nos vertiges dans des vibrations folles
et gerbions nos enzymes en nous gueulant : moteur !
mais entre deux voyages / entre deux verres d'alcool
nous n'avions pas le temps de décompter nos heures
de décompter nos heures
nous étions les danseurs d'un monde à l'agonie
en même temps que fantômes conscients d'être mort-nés
nous étions fossoyeurs d'un monde à l'agonie 
en ce temps-là le rien s'appelait quotidien
et nous allions pointer dans les jobs interdits
dans les musiques blêmes / dans les sombres parfums
dans les dédales obscurs où plane la folie
où plane la folie
et nous avions des gueules à briser les miroirs
à ne montrer nos yeux que dans le contre-jour
mais entre deux délires / entre deux idées noires
nous étions les plus beaux / nous vivions à rebours
nous vivions à rebours
nous étions les danseurs d'un monde à l'agonie
en même temps que fantômes conscients d'être mort-nés
nous étions fossoyeurs d'un monde à l'agonie 
en ce temps-là les gens s'appelaient citoyens
nous, nous étions mutants / nous étions androgynes
aujourd'hui la tempête a lynché mes copains
et je suis le dernier à rater mon suicide
à rater mon suicide
mais je veux vivre encore plus ivre de cramé
je veux ronger le mal jusque dans ses recoins
j'ai traîné mes vingt siècles d'inutilité
je n'ai plus rien à perdre / mais j'en veux pour ma fin
j'en veux pour ma faim 
Paroles et musique : Hubert-Félix Thiéfaine
© Editions Masq.

Redescente climatisée

un autre paumé descend les rues de ton ghetto
et tu pleures en essuyant ses yeux figés
combien de mutants ayant rêvé ton numéro
se sont perdus croyant l'avoir trouvé ?
petite soeur-soleil au bout du quai désert
petite gosse fugitive accrochée dans mes nerfs...
je t'ai rêvée ce soir au fond d'une ambulance
qui me raccompagnait vers mes << verts paradis >> 
dans le dernier écho de ton dernier silence
j'ai gardé pour la route ma haine / ma rage et ma connerie 
un vieux soleil glacé retraverse la nuit
et c'est le long retour au point zéro
la dernière étincelle a grillé mes circuits
et soudain j'ai si froid dans ma peau...
petite soeur-soleil au bout du quai désert
petite soeur fugitive accrochée dans mes nerfs...
maintenant je t'imagine dans un hôtel-garage
essayant de marquer des points sur ta machine
tes amants déglingués s'accrochent à tes mirages
moi je suis en exil ton consul ivre mort
bavant sur ta benzine 
Paroles et musique : Hubert-Félix Thiéfaine
© Editions Masq.